Qui suis-je, que suis-je ? Intelligence ou mémoire, la seule chose qu’il sache est qu’il n’est pas pluriel, mais singulier, singulier, singulier, quand même et malgré tout.

Couché sur le sol, ou quelque chose comme cela, il est sans doute peut-être la voix muette, la voix muette et douloureuse, celle qui ne se plaint pas, ni ne sourcille, ni ne menace.

Il est sans doute peut-être la voix monotone et langoureuse, dont les gouttes gouttent sur le toit, la voix qui n’attend ni salut, ni pitié, ni réponse, ni demande, car il ne faut pas demander, jamais, il ne faut pas mendier, de peur de devenir un mendiant, un piège comme un autre.

Oh là, y a-t-il quelqu’un ? Autrefois, il croit s’en souvenir, il y avait quelqu’un. Ou alors quelqu’un d’autre. Mais c’était peut-être une illusion. Ou le souvenir qui est une illusion. Pourtant, on dirait bien.

S’il y a quelqu’un, et si c’est vous, sachez-le, il vous invite. À entrer dans sa danse. Ou à foutre le camp. Peu importe, mais il faudra tout de même commencer par finir de choisir. Parce que les spectateurs spectatants ne pourront faire autrement que de rester dans une expectative dubitative et critiquante, qui n’intéresse personne en aucune façon. Nous, nous, si cela a un sens, il veut dire si nous a un sens, ou encore un sens, nous regarderons les spectateurs seulement spectatants avec gentillesse, méchanceté, tendresse et cruauté, et ce sera bien fait pour eux.

Au début était la souffrance. Et elle planait sur les eaux. C’est à dire n’importe où. Autant dire qu’elle avait froid, ne sachant où dormir, et qu’elle s’emmerdait. Mais Dieu, ou quelqu’un d’autre, peu importe après tout, que ce soit Dieu, ou un autre, qui serait de toute façon Dieu à sa place, Dieu, dans son immense bonté, inventa l’homme, et le tour fut joué. La souffrance se fit chair, par voie de conséquence, et plus justement, chair humaine, et les hommes commencèrent leur chemin de croix, qui n’était pourtant pas encore inventé, loin s’en fallait.

Mais là n’est pas réellement son propos. Pleurnicher est à la portée même des petits chiens, qui d’ailleurs ne s’en privent pas, comme chacun s’en souvient. Son propos, c’est presque le contraire, le sourire, un peu sardonique, c’est vrai, mais sourire tout de même que l’on peut retrouver de l’autre côté de cet autre côté, malgré la peur, le froid, le seul, et tout le reste du quotidien, qu’il ne détaille pas pour ne pas prendre le risque de se répéter.

Oh, et puis, à quoi bon tant de discours, ceux-là qui veulent savoir, à supposer même qu’ils existassent, qu’ils viennent voir, et nous verrons bien. Les autres, qu’ils nous oublient, comme nous leur avons pardonné.

C’est que ceux qui se sont trompés de tombe ont pu croire s’être trompés de croix. Ce n’était pas nécessairement la vérité. On peut jouer à close tombe, on ne peut pas jouer à triche croix. Le chemin reste en cailloux, il écorche les pieds désormais nus, puis les pieds trop écorchés ne peuvent plus aller, ce sera au tour des genoux, puis des fesses, pour ne pas dire le cul. On peut essayer de manger quelques cailloux pour se venger les gencives, mais ce sera tout de même peine perdue, car on ne les mangera pas tous.

On peut, pour protéger son cul pendant les chutes, s’y mettre des coussins, à condition tout de même d’en trouver, ce qui n’est pas encore certain, mais supposons, on pourra même changer de coussins, mais on ne changera pas de cul, et c’est bien là toute la question de fond.

Qui suis-je, que suis-je ? Intelligence ou mémoire…