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8 septembre 2025

Les dialogues de la diagonale : ne pas tirer sur le pianiste !

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Le texte :


–  Plus de six français sur dix souhaitent la démission du président de la République.
– Grotesque. Le président a été élu pour cinq ans. Personne ne peut le contraindre à raccourcir d’un jour, d’une heure son mandat.
– Président de la République, un contrat de travail à durée déterminée strictement indestructible ? Un contrat salarié à durée déterminée, difficile à rompre, certes, mais pas impossible. Le « contrat de présidence » échappe à toute possibilité de rupture ? Oui, sans doute. Une forfaiture institutionnelle.
– Une forfaiture, pourquoi ?

– Une autorité n’est un peu supportable que si et seulement si elle est nettement soutenue par une majorité, tout au long de la durée et au plus jusqu’à la fin du mandat. Le mandat, ce ne devrait pas être « au moins », mais « au plus ». Plus de majorité ? Plus de légitimité. Une autorité sans majorité, c’est-à-dire sans consensus, n’est rien d’autre qu’une dictature, insupportable pour les esprits libres. Cinq années passées, on vote. Mais si, dans le délai des cinq ans, le consensus majoritaire n’est plus certain, on ne devrait pas attendre, d’une façon ou d’une autre, on devrait vérifier le consensus, et le seul moyen de vérifier, c’est le vote. Si le vote confirmait l’absence de consensus majoritaire, le président devrait partir, ou au moins revenir devant les électeurs.
– En somme, vous contestez la légitimité du président ?

– Bien entendu. De celui-ci, ni plus ni moins que celle de ses prédécesseurs, ou celle de ceux qui viendront après lui… s’il y en a. Depuis longtemps déjà, sinon depuis toujours, le système est fait en sorte d’étouffer la voix populaire ; les Français souhaitent la démission du président, c’est très bien, mais si c’est pour le remplacer par un autre… qui fera à peu près pareil, un peu plus, un peu moins, mais finalement, du pareil au même, pour ne pas dire plus justement, du pareil au pire… à quoi bon ? Ce n’est pas l’homme qu’il faut changer, c’est le système. Ceux-là mêmes qui bêlent au changement oublient bien vite que l’actuel président ne s’est pas élu tout seul, et qu’il a en tous points produit ce qu’il était évident qu’il allait produire. Rien de plus, rien de moins. Vous êtes déçu ? Vous ne pouvez l’être que de vous-même. Lui, il n’a pas changé. En rien. Promesses non tenues ? Seulement la normalité de tout homme d’État. Encore une fois, le système : un homme d’État qui ne promettrait que ce qu’il pourrait tenir n’aurait pas la moindre chance d’être élu et ne serait donc pas un homme d’État.
– La solution, selon vous ?
– On ne peut pas jouer juste sur un piano désaccordé. Tant qu’on na pas réaccordé le piano, inutile de changer de pianiste. Comprenez-vous ?
– Non !

– Alors inutile d’en parler plus longtemps. Les jeux sont faits, rien ne va plus. Reprenons
cette conversation plus tard. Ou jamais…

8 septembre 2018


À bientôt, pour un prochain dialogue de la diagonale…

6 Commentaires

  1. Sébastien MILLERAND

    Changer de PIANISTE, c’est changer de Président ;

    Changer de PIANO, c’est changer de République ;

    Réaccorder le PIANO, c’est refaçonner… la Cinquième !

    Et si, au lieu de tout cela, on en profitait

    pour…changer d’INSTRUMENT ?

    Un rétablissement de la Royauté en France serait tout à fait concevable !

    De Gaulle, lui-même, y avait songé !

    Quant au pélican du docteur Schweitzer,

    qui était très peu mélomane, comme vous le savez,

    voici ce qu’il dit un jour à son maître :

     » Au lieu de faire semblant de jouer de L’HARMONIUM,

    tu ferais beaucoup mieux… de changer de DISQUE ! »

    Encore un insolent qui s’était cru sans doute dans…UN PIANO-BAR !

    Bien fidèlement !

    Réponse
    • Michel Georgel

      Vous êtes toujours aussi perspicace… Bravo !

      Réponse
  2. football bros

    Très pertinent article ! Le système actuel est effectivement bloqué, et changer de personnage sans toucher au fond ne résoudra rien. Lidée du réaccordage du piano est brillante. Il faudrait vraiment sattaquer aux racines pour espérer un vrai changement.

    Réponse
    • Michel Georgel

      Vous m’avez compris… Je plaisante, bravo !

      Réponse
  3. zorse

    Ce texte résonne très fort ! La critique du système plutôt que des individus est pertinente. Même si le diagnostic est juste, la solution paraît désespérée. Le débat sur la vérification du consensus est captivant. Un excellent moment de réflexion, même si lespoir semble éteint.

    Réponse
    • Michel Georgel

      Merci pour ce qui est pour moi un encouragement !

      Réponse

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