Ne va pas croir(e), Madame,
Qu’on a pleuré tout l’temps,
Ni mêm(e) qu’on n’soit plaint
Ou qu’on n(e) soit pas content.
Notre histoir(e) te fait triste,
Quand elle est chantée faux,
Quand elle est chantée triste,
Et sans les mots qu’il faut.
Ne va pas croir(e), Madame,
Qu’on n’a pas su sourire,
Et mêm(e) de temps en temps
Qu’on n’a pas su fair(e) rire.
Ne va pas croir(e), Madame,
Qu’on a manqué d’audace,
Ou même de courage,
Ou de rien de tout ça.
Ils sont venus, Madame,
Pour nous tuer nos femmes,
On n’a rien dit Madame,
On n’a mêm(e) pas pleuré.
On a fait rir(e) nos femmes
Jusqu’au dernier sourire.
On les aida, Madame,
À savoir bien mourir,
Ils sont rev’nus, Madame,
C’était pour nos enfants !
On les a suppliés,
Ils ont just(e) rigolé.
Ne va pas croir(e), Madame,
Qu’on a pleuré tout l’temps,
Ni mêm(e) qu’on se soit plaint
Ou qu’on n’soit pas content !
Les gosses convulsés,
On les a chatouillés,
Ils mourraient étouffés,
Ils mourraient apaisés.
On n’se plaint pas, Madame,
Et mêm(e) on n’demande rien.
Mais ton bonheur, Madame,
Il ne nous va pas bien !
Quant à l’éternité,
Les grands festins promis
De c’qu’on a vu ici,
Faut plus nous en conter.
On l’comprend bien, Madame,
À chacun ses raisons,
Mais quant à nous, Madame,
Un merci sans façon.
New York, juillet 2011
0 commentaires