J’ai atteint un âge où tout à fait normalement je pense avoir autant de connaissances dans ce monde que dans « l’autre ».
Pourtant, j’ai fait l’autre jour une incroyable découverte : j’ai beau forcer ma mémoire, je ne connais personne, je ne dis bien personne, qui soit « mort du Covid ». Ni « du », ni même « avec ». Personne ! Bon, je m’excuse bien sûr auprès des personnes endeuillées, mais c’est ainsi. Le hasard ?
Mais cette affirmation est peut-être fausse. Faisant abstraction d’une nouvelle catégorie de décédés : les morts-vivants du Covid. Car des morts-vivants du Covid, cela oui, j’en connais, sinon des foules, du moins des bataillons ! Des personnes de mon âge, ou plus âgées. Mais d’autres aussi plus jeunes, parfois beaucoup plus jeunes.
Terrées de peur, ne fréquentant plus personne, pas même ou surtout pas leurs proches, se faisant livrer les courses qu’on dépose à leur porte, ne sortant que masquées et à condition de ne croiser que des masqués… Bien entendu, enragées de se faire vacciner, le plus tôt, le plus vite, et bientôt, le plus souvent possible…
Conversation… téléphonée, cela va de soi :
– Mais pourquoi parler de morts-vivants ? Puisqu’ils ressusciteront sitôt la pandémie finie ?
– Non.
– Comment cela, non ?
– Je suppose que tu as lu le dernier livre de Klaus Schwab ? Le patron du forum de Davos ?
– Pas lu.
C’est ce que je comprends le moins, chez les morts-vivants du Covid. Confinés, et en principe plutôt cultivés, ils devraient avoir le temps de lire. A priori, c’est non.
– Moi je l’ai lu. Il avait annoncé la pandémie. Bon, il s’est trompé d’un facteur 100 quant au nombre de morts. Il n’empêche, il l’explique très bien. La pandémie est une occasion, sinon un prétexte. Il n’y aura plus jamais de retour à la vie d’avant. Et Véran vient de le faire confirmer par le Conseil d’État.
Pas de retour à la vie d’avant. Jamais.
De temps en temps, bien sûr, par temps d’été sans doute, comme on soulève le bouchon de la cocotte-minute, et pour la même raison, on rallongera un peu les laisses. Mais le problème, ce ne sont pas les laisses. Ce sont les colliers, et eux, pas question qu’on vous permette jamais de ne plus les porter.
Sauf si, par hasard, les peuples finissaient par comprendre tous ensemble et tous en même temps que la peur est une mort anticipée. Si tous ensemble et tous en même temps, ils décidaient de jeter par-dessus le bord de la vraie vie, masques, vaccins, confinements délétères et autres monstrueuses distanciations sociales. De reprendre le risque de vivre. Le risque de vivre, qui est aussi celui de mourir. Une vraie mort, condition même de la vraie vie.
Tout de même infiniment mieux qu’une réclusion de mort-vivant, à tout jamais confiné.
Enfin, bon, c’est mon avis.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Paris, 22 avril 2021
Nota : histoire de travailler à ma propre gloire, puisque personne ne le fait pour moi, je me permets de citer ces deux dernières lignes du prologue de l’un de mes romans, « La fille sans prénom » :
« … parce que l’on peut tout oublier, sauf la vie même. La douleur de la vie. À la mer, au vent, et au désespoir joyeux ! »
Quel rapport ? À vous de voir…
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