/Opinions eclairées

1 mai 2014

Imagination trop facile

On en a tant parlé que personne ne peut plus l’ignorer : une jeune femme a été agressée dans le métro lillois, en présence de témoins qui sont restés passifs.

Indignation nationale ! La gent journalistique, aux abois ! La gent politique, aux menaces ! Non-assistance à personne en danger ! Amende, prison, les mots sont doctement prononcés…

Bien entendu, rien de tel ne serait advenu si un seul de tant de beaux parleurs se fut compté parmi les lâches témoins, qui ne l’eussent donc pas été. Nul doute que tous ces héroïques eussent immédiatement trouvé le moyen de faire cesser les choses, et protégeant la victime, de mettre le voyou hors de nuire. Ben voyons !

Comment eussent-ils fait ? Auraient-ils demandé, poliment, bien sûr, au méchant agresseur de bien vouloir cesser d’agresser ? Bon. Mais si l’agresseur avait continué d’agresser ? Ou pire, menacer de changer de victime ?

Et vous, me demandez-vous, qu’auriez-vous fait ?

Puis-je vous le dire franchement ? Cela dépend. Cela dépend de quoi ? Cela dépend du lieu où se produit l’agression. Le lieu ? Non, à vrai dire pas tant le lieu, que le… pays !

Le pays ? Oui, le pays. Expliquez-vous !

Soit. Je puis vous en parler, parce que précisément, il s’agit d’une situation que j’ai connue. Ailleurs qu’en France, je fonce. Et je n’y ai pas tellement de mérite, parce que je ne suis pas le seul ! C’est même le contraire ! Tout le monde fonce ! Et c’est tant pis pour le délinquant, qui a bien des chances de s’en trouver plus ou moins mal !

Est-il blessé ? Oui, cela peut se produire. Que se passe-t-il ensuite ? Un ou plusieurs représentants de l’ordre finissent par apparaître, ils se chargent de la suite. Non sans nous avoir tous félicités pour notre détermination. Au plus, on note nos noms et nos adresses. Pour être les témoins du futur procès du délinquant. Et puis, nous rentrons chacun chez soi.

Et que faites-vous en France ? Oh ! Là, je serai beaucoup plus circonspect ! Supposez par exemple, qu’au cours de l’échauffourée à prévoir, moi, et ceux qui agiraient avec moi, en viennent à blesser, par maladresse, par hasard, le vilain agresseur ? La suite, chacun la connaît ! L’agresseur ne l’est plus, c’est une victime ! Quant à nous, nous sommes tous mûrs pour, au minimum, une garde à vue garantie ! Voire des poursuites, des années de procès et soucis… Une telle perspective, voilà qui donne à réfléchir… C’est que dans le pays de Madame Taubira, le délinquant à bientôt fait de n’être pas celui qu’on croit !

Mais qui vous demande d’intervenir ? Il vous suffit de téléphoner, de solliciter les forces de l’ordre, de tirer la sonnette d’alarme… On croit rêver ! Candeur ! Naïveté ! Ou pure hypocrisie ? À supposer que l’appel rencontre quelque écho, ce qui est loin d’être certain, qui peut croire qu’il serait suivi d’un effet assez rapide pour sauver l’agressée ? Qu’il se rassure, l’agresseur dispose de tout le temps nécessaire à son forfait ! Et même celui de le renouveler, si l’envie lui en reste.

Téléphoner ? Allons, disons-le, autant avoir la franchise de ne rien faire.

Tiens, c’est exactement ce qu’ont choisi les témoins de Lille…

À ce sujet, au hasard d’une vie quelque peu voyageuse, deux épisodes.

En France. Plus précisément, à Paris. Rue de Tolbiac. Je « fais la queue » devant un distributeur automatique. Devant moi, une jeune femme semble avoir des difficultés avec le distributeur. Un passant, surgi par hasard, se propose de l’aider. J’attends mon tour, en pensant à autre chose. Soudain, la jeune femme crie. Le passant court. « Il a pris mon argent et ma carte bleue », crie la jeune femme. Je peine à revenir à la réalité, à prendre conscience du réel. Ce n’est pas le cas de deux noirs athlétiques qui faisaient la queue derrière moi. La jeune femme n’a pas crié qu’ils se sont élancés. Le plus rapide a tôt fait de rattraper le voleur, qu’il projette au sol. Clé de bras. Le voleur braille, on lui reprend son butin. Mais voilà que la jeune femme… prenant le parti du voleur, insulte les courageux intervenants, leur reproche leur brutalité, demande qu’ils relâchent leur prisonnier… rapidement, on s’attroupe, on menace… non pas le voleur, mais les héros… qui rapidement dégoûtés, haussant les épaules, laissent s’enfuir le voyou et délaissent la scène. Seul, j’irai les féliciter, ils ne me cachent pas leur dégoût… et m’assurent qu’on ne les y reprendra plus, mais plus jamais…

Australie, Sydney. La baie de Sydney est systématiquement parcourue d’un véritable réseau de bateaux bus qui relient ses différents sites. Venant de Manly en direction de Sydney, nous sommes, ma femme et moi, dans l’un de ces bateaux bus. Accostage, on annonce que nous allons pouvoir débarquer. À ce moment, deux individus arrachent le sac d’une dame assise devant nous, et partent en courant. Ma femme crie, indignée. Les voyous n’ont pas couru vingt mètres que vingt bras de dix gaillards, aussi solides que déterminés, les ont rattrapés, aussitôt maîtrisés. La foule applaudit. Deux policiers interviennent, les voyous sont menottés. Bizarrement, on les devine plutôt soulagés. C’est que le comportement de la foule ne leur laisse pas de doute, en l’absence des forces de l’ordre, un certain parfum de lynchage…

Les peuples ont les gouvernements qu’ils méritent, dit l’adage. On pourrait dire aussi : les peuples ont les citoyens qu’ils méritent.

De vous à moi, que serait-il advenu au courageux intervenant qui aurait blessé (ou plus), l’agresseur du métro ? Au très humble avis de votre serviteur, c’est peut-être un peu hâtivement que l’on a blâmé les « témoins de Lille ».

Nota : pour compléter (et conforter ?) cette analyse, je renvoie mon lecteur à ce très intéressant article qui, je le reconnais, va beaucoup plus loin que moi, publié sur le site « Hashtable » : http://h16free.com/2014/04/29/30738-agression-lilloise-doit-on-vraiment-compter-sur-la-collectivite ! 

Paris, le 1 Mai 2014

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