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30 septembre 2025

Les dialogues de la diagonale : adieu Léonard !

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Le texte :


– Bonjour ! Je me présente, je suis la remplaçante de Léonard.

– Léonard ?

– Oui ! La personne à laquelle vous avez brutalement tourné le dos, lors de votre ultime entretien. Vexé, il ne veut plus vous rencontrer. J’ai été désignée pour le remplacer. L’agence de notation Fitch abaisse la note souveraine de la France à A+. Qu’en dites-vous ?

– Léonard, il s’appelait donc Léonard ! Je m’étais un peu habitué à lui, je vais presque le regretter.

– Lui dit ne pas vous regretter. Il m’a prévenue : vous seriez un personnage insupportable.

– Je suis un personnage insupportable. Pourtant, je veux bien vous répondre.

– Formidable, je vous écoute !

– Soyez gentille ! Rappelez-moi votre question ?

– L’agence Fitch !

– Ah oui, Fitch ! Quelle farce !

– Une farce ? Les agences de notation, c’est du lourd, c’est du sérieux !

– Puis-je vous interroger ?

– ?

– Les agences, selon vous, qui les paye ?

– Pourquoi me demandez-vous cela ?

– Dis-moi qui te paye, je te dirai si je te crois.

– Je ne sais pas qui paye les agences, je ne me suis jamais posé ce genre de question ! Les états, je suppose ?

– Non ! Si les états finançaient officiellement les agences, ces dernières perdraient toute forme de crédibilité. Ce ne sont pas les états qui financent, du moins jamais de manière directe. Une sorte de logique voudrait que ce soient les prêteurs : ces derniers voudraient s’assurer de la future solvabilité des entités qui émettent de la dette. Mais ce n’est pas le cas. Ce sont les émetteurs de titres de dettes qui payent (à l’exception une fois encore, des états, qui sont pourtant les plus gros émetteurs) ; en fait, officiellement en tout cas, c’est une minorité des émetteurs de dette qui financent. Maintenant, supposons que les avis que pouvez lire sur les entreprises soient payés par… ces entreprises : quel crédit apporteriez- vous à de tels avis ?

– Aucun bien sûr. Mais ce n’est pas pareil.

– Je vous mets au défi de me le démontrer. Autre question : pourquoi, selon vous, Fitch a-t- elle baissé la note française ?

– Tout le monde le sait : les Français dépensent trop, les comptes publics sont dégradés, l’endettement est excessif.

– Tout cela est vrai, mais depuis fort longtemps, et pour autant, Fitch ne réagissait pas. Alors pourquoi maintenant ? Pour aucune des raisons que vous invoquez, convenez-en.

– Alors quoi, selon vous ?

– Pourquoi Fitch n’a-t-elle pas dégradé dès qu’elle aurait dû le faire : pour ne pas contrarier le président de la République. Pourquoi le fait-elle maintenant ? Parce que cela ne contrarie en rien le président, c’est même le contraire. Le facteur déclencheur n’est pas économique, mais politique : le refus par les députés de voter la confiance à monsieur Bayrou. Le narratif, pour parler à la mode, sera désormais : vous votez mal, voyez le résultat, tout cela est strictement de votre faute ! À partir de là, mains libres au pouvoir pour contourner le problème de ces gens qui ne savent pas voter ce qu’on leur dit : dissolution, article 16, réquisitions diverses de la monnaie des Français, censure partout, interdiction d’expression de tout ce qui n’est pas média relevant de l’état, que sais-je encore ? Vous voulez une preuve de ce que j’avance ?

– Il n’en existe pas, bien sûr !

– Tant de Cassandre l’avait annoncé : la dégradation serait synonyme du pire. Flambée des taux d’intérêt, impossibilité pour l’état de se refinancer… Rien de tout cela. Les taux d’intérêt ont flambé, mais bien avant la dégradation de la note, et depuis, rien de plus. Les prêteurs, confiants dans l’appareil de Bercy continuent de prêter, la Bourse ne s’est pas du tout effondrée, elle continue au contraire son petit bonhomme de croissance.

– Et vous expliquez cela comment ?

– Comme je l’ai annoncé : les agences de notation sont seulement une farce. Elles ne servent à rien, car tous les acteurs réellement concernés sont réellement informés, et tous, ils avaient, depuis longtemps « anticipé ». Ils continuent et continueront de le faire, et le seul Grosjean de la face s’appelle Nicolas : Nicolas, tout seul, paye pour tout le monde, et il va continuer de le faire…

22 septembre 2025

1 Commentaire

  1. Mandereau

    Logique

    Réponse

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